20  Résultats

20.1 Implants

20.1.1 Introduction

En Belgique, c’est l’Agence fédérale des médicaments et produits de santé (AFMPS) qui est l’autorité compétente pour garantir la qualité, la sécurité et l’efficacité des médicaments et des produits de santé (dispositifs médicaux et accessoires, matières premières, sang et ses composants d’origine humaine, matériel corporel humain), en développement clinique et sur le marché.

L’AFMPS met à la disposition du public et des professionnels de santé l’ensemble des informations relatives aux dispositifs médicaux via le lien suivant: https://www.afmps.be/fr/humain/produits_de_sante/dispositifs_medicaux

Les implants de la hanche font partie des dispositifs médicaux de classe III.

Les dispositifs médicaux de classe III dépendent du règlement européen 2017/745 relatif aux dispositifs médicaux.

Les règlements ne doivent pas être transposés en droit national pour être applicables. Cependant, ceux-ci prévoient que des mesures nationales peuvent être prises via la législation nationale pour l’implémentation des règlements.

Cela a été fait via la loi du 22 décembre 2020 relative aux dispositifs médicaux et ses arrêtés d’exécution:

Cela a été fait via la loi du 15 juin 2022 relative aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro et ses arrêtés d’exécution

Les dates clés du règlement européen 2017/745 sont d’une part son entrée en vigueur le 25 mai 2017 et d’autre part sa date d’application le 26 mai 2021.

Différentes phases de transition sont prévues pour certains dispositifs afin de se mettre en conformité selon toutes les exigences des règlements. La date à laquelle un dispositif médical devra être conforme dépend de sa classification, de la date de validité de son certificat CE (si d’application) ou de la date de la déclaration de conformité UE.

Les questions de recherche posées dans le cadre de l’audit des prothèses de hanche sont les suivantes:

  • Comment l’information concernant les implants est-elle relayée auprès des patients (carte d’implant)?
  • Les hôpitaux répondent-ils entièrement ou en partie aux exigences des réglementations en vigueur en ce qui concerne l’enregistrement de certains implants dans le registre central de traçabilité et les notifications d’incidents en lien avec les implants vers l’AFMPS?
  • Comment est organisé le comité du matériel médical ou des dispositifs médicaux au sein des différents hôpitaux interrogés?
  • Existe-t-il des conventions entre hôpitaux et firmes pour la livraison à vue ou la consignation des implants?

Les affirmations reprises ci-dessous ont pu être établies selon les réponses obtenues via les questionnaires en ligne envoyés à 98 hôpitaux et selon les informations récoltées lors des 30 audits sur place.

20.1.2 Carte d’implant

A l’heure actuelle, seul un tiers (33.7 %) des hôpitaux concernés par les prothèses de hanche fournissent la carte d’implant au patient. D’autre part, 35.7 % des hôpitaux indiquent que le fabricant ne la fournit pas avec le dispositif. Ceci ne correspond pas encore aux exigences de la réglementation européenne 2017/45. En effet, il prévoit à l’Article18 chapitre 2 du règlement (UE) 2017/745 que « Les États membres exigent des établissements de santé qu’ils mettent à la disposition des patients chez lesquels le dispositif a été implanté les informations visées au paragraphe 1, par tout moyen permettant un accès rapide aux dites informations, ainsi que la carte d’implant, sur laquelle est mentionnée leur identité ».

Le questionnaire nous ayant permis de constater que le patient ne reçoit pas toujours une carte d’implant après une prothèse de hanche, nous avons récolté des informations complémentaires lors des 30 visites sur place:

  • 19 des hôpitaux visités ne reçoivent pas la carte d’implant, car la firme ne la fournit pas tandis que 6 hôpitaux la reçoivent de temps en temps et 5 la reçoivent systématiquement. La mise à disposition de la carte par la firme est variable d’une firme à l’autre;
  • Si aucune carte d’implant n’est fournie par la firme, 21 hôpitaux n’entreprennent aucune action. 9 hôpitaux ont toutefois développé des solutions alternatives pour informer le patient des caractéristiques de son implant (photocopie des étiquettes, document interne…).

20.1.3 Système d’identification unique (Unique Device Identification System)

Dans le règlement 2017/745 (UE) (chapitre III, article 27, paragraphe 9) «Les établissements de santé enregistrent et conservent, de préférence par des moyens électroniques, l’UDI des dispositifs qu’ils ont fournis ou qu’on leur a fournis, si ces dispositifs font partie des dispositifs implantables de classe III».

Pour les dispositifs sous la directive, aucun UDI n’est obligatoire.

Le questionnaire en ligne nous indique que l’UDI des dispositifs est conservé dans 68 % des hôpitaux ayant répondu comme prévu dans le règlement (UE) 2017/745. Dans le cadre de cette question, la distinction n’a pas été faite entre dispositifs sous directive ou sous règlement.

20.1.4 Registre central de traçabilité (RCT)

Le 1er octobre 2016, l’industrie des technologies médicales, BeMedTech, et la ministre de la Santé publique ont conclu le Pacte Technologies Médicales. Ce pacte visait entre autres à améliorer la sécurité et l’accessibilité des dispositifs médicaux pour le patient.

Dans cette optique, l’AFMPS a mis en place un Registre Central de Traçabilité (RCT) qui est disponible sur la plateforme eHealth. Le RCT repose sur la base légale de l’article 51 de la loi du 15 décembre 2013 en matière de dispositifs médicaux.
La plateforme eHealth centralise toutes les données introduites concernant la pose et le retrait d’un dispositif médical implantable. La notification de pose ou de retrait d’implants est obligatoire pour les implants prothèses de hanche depuis le 1er mai 2021 (cfr annexe de l’arrêté royal du 27.09.2020 relatif au Registre central de traçabilité)

Les professionnels de la santé doivent notifier dans le RCT toute pose ou retrait d’un implant, via une application web. Au niveau hospitalier, un échange de données direct entre les systèmes hospitaliers et le RCT est la manière la plus adéquate pour notifier les dispositifs médicaux implantés/explantés.

Chaque notification est validée au moyen de différentes bases de données (sources authentiques), pour garantir la qualité et l’exactitude des données.

En cas de problèmes avec un implant spécifique, l’AFMPS peut utiliser les données anonymisées du RCT afin d’estimer les risques de sécurité et l’ampleur du problème, et ainsi avertir les professionnels de la santé concernés, qui à leur tour peuvent informer les patients futurs et actuels.

Les hôpitaux ont été interrogés sur cette thématique via le questionnaire en ligne. La notification de pose ou de retrait d’implant de prothèse de hanche est enregistrée dans le registre central de traçabilité dans 58 des 98 hôpitaux répondants.

20.1.5 Notification d’incidents

Lorsqu’un dispositif médical est disponible sur le marché, l’AFMPS assure la matériovigilance. La matériovigilance fait partie de la surveillance des dispositifs médicaux sur le marché. Elle couvre de nombreux aspects, dont l’étude et le suivi d’incidents pouvant résulter de l’utilisation de dispositifs médicaux ou encore le suivi des actions correctrices sur le terrain. L’AFMPS enregistre les notifications et utilise les informations rapportées pour assurer la surveillance du marché du dispositif en question.

Les professionnels de la santé ont l’obligation de notifier à l’AFMPS les incidents en lien avec l’utilisation des dispositifs médicaux. Tous les incidents ne doivent pas être notifiés à l’AFMPS, mais uniquement ceux remplissant les trois critères suivants:

  1. Un incident a lieu avec un dispositif médical;
  2. Le dispositif médical est suspecté être la cause de l’incident;
  3. L’événement a eu pour conséquence (ou aurait pu avoir pour > conséquence) la mort ou une dégradation grave de l’état de santé > du patient ou d’un utilisateur du dispositif médical.

Pour faciliter l’application de ces critères de notification, l’AFMPS met à disposition un arbre décisionnel.

Les autres incidents ne remplissant pas les critères cités peuvent toujours être notifiés directement au fabricant du dispositif médical pour lui permettre d’améliorer son produit en permanence.

Lors du questionnaire en ligne, 39 % des hôpitaux ne mentionnent aucun problème avec les implants de prothèse de hanche tandis que 61 % ont déclaré au moins un problème d’ordre quantitatif ou d’ordre qualitatif.

Les problèmes d’ordre quantitatif (indisponibilité du matériel) concernent la majeure partie des incidents (40 %). Les problèmes les plus fréquents sur le plan qualitatif sont ceux relatifs à la stérilité (24 % des cas). Les autres relèvent du choix du matériel (lorsque celui-ci a été mal rangé par exemple), de l’information du matériel (par exemple lorsqu’un implant possède un mauvais étiquetage) ou liés à un matériel défectueux.

Par ailleurs, il ressort de l’enquête en ligne que 71 sur les 98 hôpitaux (72 %) n’ont jamais effectué de notification d’incident à l’AFMPS dans le cadre d’une intervention pour prothèse totale de hanche élective. Parmi les hôpitaux qui déclarent, 19 ont déclaré un incident il y a plus d’1 an, tandis que 4 d’entre eux ont déclaré un incident entre 3 et 12 mois et 4 autres il y a moins de 3 mois.

Lors des visites sur place, 21 hôpitaux sur 30 suivent une procédure pour signaler un incident en lien avec l’implant à l’AFMPS. La plupart du temps, c’est une procédure interne qui est expliquée mais celle-ci ne correspond pas à ce qui est demandé par l’AFMPS (formulaire, critères… ). Les chirurgiens interrogés ne connaissent pas toujours cette obligation.

20.1.6 Comité du matériel médical / Comité des dispositifs médicaux

L’article 27 de l’AR du 4 mars 1991décrit les missions du comité du matériel médical, notamment l’établissement et la mise à jour du «formulaire matériel médical» de même que la rédaction d’un rapport interne dont les items sont décrits dans l’alinéa 5.

Note d’info:

§1er. Le comité du matériel médical est chargé des missions suivantes :

1° mettre en oeuvre et contrôler l’enregistrement, qui est obligatoire pour tous les dispositifs implantables de catégorie I et II, et la vigilance. Faire les rapports prévus dans ce cadre;

2° établir et mettre à jour un « formulaire matériel médical », se présentant sous la forme d’une liste des dispositifs médicaux disponibles en permanence à l’hôpital, et les modalités d’application dudit formulaire.

Pour sélectionner les dispositifs médicaux qu’il y a lieu de faire figurer dans le « formulaire matériel médical », le comité tient compte d’une utilisation adéquate du point de vue médico-clinique et économiquement justifiée, des coûts prévus par la réglementation en vigueur établissant la nomenclature des prestations de santé et du financement prévu par le budget des moyens financiers des hôpitaux. Les modalités d’application concernent notamment les exceptions aux dérogations au formulaire et sont, de préférence, définies selon un large consensus entre les utilisateurs cliniciens concernés et le comité du matériel médical;

3° informer régulièrement les utilisateurs professionnels de dispositifs médicaux à l’hôpital sur le prix de revient des dispositifs médicaux et le remboursement de ceux-ci par l’assurance soins de santé et indemnités;

4° promouvoir un usage standardisé des dispositifs médicaux utilisés dans le cadre des procédures diagnostiques et thérapeutiques;

5° rédiger un rapport interne reprenant les éléments suivants :

a)  la consommation de matériel, renseignée par catégorie, par service et, le cas échéant, par médecin, en corrélation avec les procédures diagnostiques et thérapeutiques mises en oeuvre;

b)  l’analyse des écarts par rapport à des modèles de consommation comparatifs et à des références nationales et internationales, plus particulièrement en matière de pathologies comparables;

c)  les mesures prises dans le but de supprimer les divergences de pratique non justifiées, constatées à partir des éléments visés au a) et au b) ;

6° diffuser, parmi le personnel médical, le rapport interne visé au 5°, analyser avec les services concernés et le personnel hospitalier les éléments qui y sont évoqués et organiser un suivi permanent de l’utilisation des dispositifs médicaux et du respect des directives élaborées en la matière;

7° établir des directives relatives à la réutilisation de dispositifs médicaux, fondées sur les normes nationales et internationales concernant la sélection des dispositifs médicaux, les procédures et la traçabilité;

8° instituer des groupes de travail internes avec un ou plusieurs médecins-spécialistes, infirmiers ou autres collaborateurs représentant la spécialité médicale concernée, en qualité d’utilisateur, afin de préparer et de traiter les questions liées au matériel médical en fonction de la discipline ou du service spécialisé concerné;

9° établir une procédure standardisée d’utilisation du matériel médical pour les essais cliniques, conforme aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur, notamment à la loi du 7 mai 2004 relative aux expérimentations sur la personne humaine. 

L’enquête en ligne nous indique quels sont les principaux critères qui initient les modifications du formulaire médical pour les implants de prothèses de hanche. Plusieurs réponses étaient possibles. Elles sont reprises dans la Figure 20.1.

Figure 20.1: Main criteria for making changes to the medical form.

Au sein du Comité du Matériel Médical, une modification du formulaire médical est guidée dans 56 hôpitaux sur 98 par le souhait d’obtenir un nouvel implant qui serait plus performant que le précédent. 31 hôpitaux déclarent modifier la liste sur base des complications liées aux implants disponibles et 29 hôpitaux s’adaptent systématiquement à l’évolution de l’industrie. 8 hôpitaux signalent l’absence d’un formulaire médical disponible.

66 hôpitaux ne rédigent aucun rapport annuel. Parmi les 32 hôpitaux qui rédigent un rapport interne, les différents items repris dans leur rapport sont disponibles dans la Figure 20.2.

Tous ces items devraient pourtant être présents dans le rapport interne conformément à l’article 27 de l’AR du 4 mars 1991.

Figure 20.2: Items to be included in an annual report by the medical material committee.

20.1.7 Livraison des sets d’ancillaires

A la livraison du set d’ancillaires, les hôpitaux interrogés affirment n’avoir jamais été confrontés aux problématiques suivantes:

  • mauvaise composition du set (26 %)
  • un instrument défectueux ou mal aiguisé (36 %)
  • emballage défectueux (39 %)
  • absence de liste d’instruments (43 %)
  • défaut de propreté (52 %)

20.2 Antibioprophylaxie

20.2.1 Données de facturation

Sur base des données de facturation pour les séjours sélectionnés en 2019, la céfazoline est facturée pour 94 % des séjours dans le cluster 2 (PTH pour arthrose). Dans le cluster 3 (PTH pour fracture) et 5 (prothèse fémorale pour fracture) la céfazoline a été facturée dans 91 % des cas.

La clindamycine, la vancomycine et le céfuroxime ne sont facturés que très sporadiquement (dans moins de 5 % des séjours).

20.2.2 Questionnaire en ligne

20.2.2.1 Prothèse totale de hanche pour arthrose

96 % (94/98) des hôpitaux utilisent des procédures écrites pour l’antibioprophylaxie dans le cadre de la prothèse totale de hanche élective. La majorité des hôpitaux (89/98 soit 89 %) administre l’antibioprophylaxie dans les 60 minutes qui précèdent l’incision et 3 hôpitaux l’administrent dans les 2 h avant l’incision. Cependant, 12 hôpitaux déclarent poursuivre une antibioprophylaxie pendant 2 jours et 1 hôpital pendant 3 jours après l’intervention.

20.2.2.2 Prothèse totale ou fémorale pour fracture

95 % (93/98) des hôpitaux utilisent des procédures écrites pour l’antibioprophylaxie dans le cadre du traitement de la fracture du col du fémur fermée. La majorité des hôpitaux (89/98 soit 91 %) administrent l’antibioprophylaxie dans les 60 minutes qui précèdent l’incision. 5 hôpitaux réalisent l’antibioprophylaxie dans les 2 h précédant l’incision et 4 hôpitaux au moment de l’incision. L’administration d’antibiotique dans ce contexte de prophylaxie se prolonge en post-opératoire d’1 jour pour 11 hôpitaux, de 2 jours pour 1 hôpital.

20.3 Thromboprophylaxie

20.3.1 Données de facturation

Sur base des données de facturation des séjours sélectionnés pour 2019, les héparines de bas poids moléculaire (HBPM) sont facturées systématiquement dans 93 % des séjours du cluster 2 (PTH pour arthrose), 96 % des séjours du cluster 3 (PTH pour fracture) et 98 % des séjours du cluster 5 (prothèse fémorale pour fracture). L’acide acétylsalicylique est facturé dans 17 %, 25 % et 29 % des séjours respectivement pour les clusters 2, 3 et 5. L’inhibiteur du facteur Xa est facturé dans 10 % des séjours des cluster 2 et 3, et dans 13 % des séjours du cluster 5.

20.3.2 Questionnaire en ligne

20.3.2.1 Prothèse totale de hanche pour arthrose

96 % (94/98) des hôpitaux utilisent des procédures écrites pour la thromboprophylaxie. 74,5 % des hôpitaux (73/98) utilisent une HBPM chez un patient subissant une intervention chirurgicale pour prothèse totale de hanche et ne prenant pas d’antiagrégants ou d’anticoagulants. Les nouveaux anticoagulants par voie orale (NOAC = non-vitamin k antagonist oral anti-coagulants) et les antiagrégants sont utilisés respectivement dans 12 % et 11 % des hôpitaux.

La durée d’utilisation de l’HBPM est de 14 à 35 jours dans 90 % des hôpitaux (88/98 hôpitaux).

Chez un patient qui est déjà traité par antiplaquettaire ou anticoagulant, 93 % (91/98) des hôpitaux utilisent des procédures écrites pour leur arrêt ou leur adaptation préopératoire.

20.3.2.2 Prothèse totale ou fémorale pour fracture

95 % (93/98) des hôpitaux utilisent une procédure écrite décrivant la thromboprophylaxie dans ce contexte.

Sur base des visites de terrain, 23 hôpitaux sur les 30 visités déclarent avoir une procédure pour les patients avec une fracture et sous anticoagulant à l’admission permettant de les opérer dans les meilleurs délais. 22 d’entre eux ont pu nous la montrer. Parmi les 8 hôpitaux n’ayant pas une telle procédure, 3 sont en train de la développer.

20.4 Patient Blood Management (PBM) dans le cadre de la prothèse de hanche programmée

Belgian Quality in Transfusion (BeQuinT) a vu le jour en 2011 au titre de comité d’accompagnement soutenu et financé par le SPF Santé Publique, Sécurité de la Chaîne Alimentaire et Environnement (SPF SPSCAE) en vue d’appuyer la politique de transfusion et d’hémovigilance des hôpitaux belges et ainsi optimiser par ailleurs l’utilisation des composants sanguins.

Depuis 2018, BeQuinT supporte aussi la mise en oeuvre du Patient Blood Management (PBM) dans les hôpitaux belges (entre autre par une première enquête sur le PBM).

La dernière définition du PBM (Shander et al. 2022) est la suivante: approche multidisciplinaire et multimodale, centrée sur le patient et fondée sur des données probantes, visant à améliorer les résultats pour le patient en gérant et en préservant son propre sang, tout en encourageant la sécurité et la participation du patient.

20.4.1 Contexte préopératoire

61 hôpitaux sur les 98 (62 %) déclarent utiliser une procédure écrite pour le dépistage systématique de l’anémie chez le patient devant subir une intervention élective de prothèse totale de hanche. Parmi ces 61 hôpitaux, 24 décrivent le dépistage systématique d’un déficit en fer.

Si un dépistage systématique est réalisé, la majorité des hôpitaux (66/98) procèdent à un dépistage systématique préopératoire entre 4 semaines et 48 h avant l’intervention. 16 hôpitaux déclarent ne jamais dépister l’anémie préopératoire. Les autres réponses sont reprises dans la Figure 20.3.

Figure 20.3: Timing of preoperative screening.

46 hôpitaux déclarent disposer d’une procédure écrite pour la prise en charge thérapeutique de l’anémie.

Pour une valeur seuil d’Hémoglobine (Hb) ≤ 10g/dl, 65 % des hôpitaux effectuent une exploration complémentaire chez un homme versus 72 % chez une femme. Les valeurs seuils par hôpital sont disponibles dans l’annexe «Résultats du questionnaire en ligne trajet de soins arthrose».

Par ailleurs, 70 % (68/98) des hôpitaux reportent l’intervention (souvent à toujours) jusqu’à l’identification et le traitement de la cause de l’anémie.

Pour remédier à l’anémie, la plupart des hôpitaux administrent du fer. La Figure 20.4 suivante montre dans quelle mesure l’administration du fer est réalisée par voie orale ou intraveineuse.

Figure 20.4: Frequency and method of iron administration for the preoperative management of iron deficiency anaemia.

20.4.2 Contexte peropératoire

En ce qui concerne les antihémorragiques, la facturation de l’acide tranexamique est retrouvée dans 80 % des séjours du cluster 2 (PTH pour arthrose), 65 % des séjours du cluster 3 (PTH pour fracture) et 44 % des séjours du cluster 5 (prothèse fémorale pour fracture).

D’après l’enquête en ligne, 98 % (96/98) des hôpitaux utilisent l’acide tranexamique dans le cadre d’une prothèse totale de hanche élective. Cette utilisation n’est toutefois pas systématique. La Figure 20.5 ci-dessous montre comment les hôpitaux l’utilisent dans le cadre d’une prothèse totale de hanche élective. Seuls 54 hôpitaux sur les 98 interrogés (55 %) l’utilisent de manière systématique.

Figure 20.5: Frequency of administration of tranexamic acid during primary total hip replacement.

Lors de son utilisation, 64 % (63/98) des hôpitaux déclarent travailler avec une procédure écrite.

Lors d’une prothèse de hanche élective, 70 % (69/98) des hôpitaux n’utilisent jamais de récupérateur sanguin. Lorsqu’ils l’utilisent (29 hôpitaux), 13 hôpitaux disposent d’une procédure écrite concernant son usage.

En-dehors du cadre de la prothèse de hanche élective, la Figure 20.6 suivante décrit les situations dans lesquelles le cell saver est utilisé. Plusieurs réponses étaient possibles. 71 hôpitaux déclarent utiliser le cell saver dans les cas complexes où l’on doit s’attendre à d’importantes pertes sanguines. Compte tenu de la perte de sang limitée dans le cas d’une PTH unilatérale élective, le cell saver n’est pas utilisé de manière routinière dans la majorité des hôpitaux interrogés.

Figure 20.6: Situations in which the cell saver is used apart from an elective hip prosthesis.

Enfin, 88 % (86/98) des hôpitaux déclarent que la politique transfusionnelle définie au niveau institutionnel est transposée au sein du service d’orthopédie. 3 hôpitaux déclarent qu’elle ne l’est pas. Il est possible que des seuils de transfusion restrictifs tels que définis dans le manuel de transfusion de l’hôpital (ou dans la politique de l’hôpital) soient utilisés en tenant compte de la perte de sang active, des comorbidités et de la clinique du patient.

Enfin, 9 hôpitaux déclarent ne pas disposer d’une politique transfusionnelle institutionnelle.

20.4.3 Contexte postopératoire

69 % (68/98) des hôpitaux utilisent des procédures écrites pour la reprise du traitement en postopératoire d’un patient traité précédemment par anticoagulant ou antiagrégant et 71 % (70/98) des hôpitaux utilisent une procédure écrite guidant la conduite à suivre pour une transfusion post-opératoire.

Si l’anémie postopératoire nécessite un traitement ferrique, la fréquence et la mode d’administration du fer sont repris dans la Figure 20.7 suivante.

Figure 20.7: Frequency and method of iron administration for the management of postoperative anaemia.

20.4.4 Analyse statistique complémentaire

Dans l’analyse suivante, nous testons l’hypothèse selon laquelle “l’utilisation de procédures hospitalières pour la gestion du sang chez les patients est liée à la probabilité de transfusion de sang lors d’une prothèse totale de hanche”.

Les trois questions relatives à l’utilisation de politique ou procédures sont les suivantes:

  • Est-ce que la politique transfusionnelle définie au niveau institutionnel est transposée au sein du service d’orthopédie? (oui/non/il n’y a pas de politique de transfusion au niveau de l’hôpital); policy
  • Existe-t-il une procédure écrite pour le dépistage systématique de l’anémie chez le patient devant subir une intervention élective de prothèse totale de hanche? (oui/non); bloedarmoede
  • Utilisez-vous une procédure écrite concernant l’usage de l’acide tranexamique dans le cadre de la prothèse totale de hanche élective? (oui/non); tranex

La distribution des réponses à chaque question est présentée dans la Table 20.1 ci-dessous. Pour bloedarmoede et tranex, des réponses hétérogènes entre les hôpitaux sont observées.

Pour la politique (policy), en revanche, la plupart des services d’orthopédie appliquent la politique transfusionnelle de l’hôpital. Ainsi, pour cette variable, il pourrait être difficile de détecter des effets sur le niveau de consommation de sang dans le contexte de la chirurgie de la hanche.

Table 20.1: Distribution of answers to each question
# HCI
bloedarmoede
ja 61
neen 37
policy
geen 8
ja 87
neen 3
tranex
ja 63
neen 35

Les catégories de réponses des hôpitaux aux trois questions relatives à l’utilisation des protocoles sont indiquées entre parenthèses. Le nom de la variable est indiqué en gras, car il y sera fait référence dans la suite de l’analyse.

La consommation de sang par séjour est déterminée en comptant le nombre d’unités de sang facturées. Les codes correspondants sont les suivants :

  • 752463 : Sang total et produits sanguins labiles - Concentré érythrocytaire déleucocyté : unité adulte : par unité “adulte” de concentré érythrocytaire déleucocyté, filtre inclus
  • 752566 : concentré d’érythrocytes délégué : unité autologue
  • 752581 : concentré d’érythrocytes délégué irradié : unité « adulte »

En pratique, près de 98 % des facturations concernent le code 752463.

Les dates de facturation pour les séjours de 2018 à 2020 sont utilisées. Les questions étant en lien avec une chirurgie de PTH programmée, seul le cluster 2 (PTH pour arthrose) est analysé. Les questions ont été posées en 2022. L’ensemble des séjours représente 53 692 séjours.

L’analyse est effectuée en deux étapes :

  • tout d’abord, la probabilité de consommation de sang au cours d’un séjour est modélisée
  • ensuite, on modélise la consommation de sang totale et le nombre d’unités de sang facturées

Dans les deux cas, la consommation de sang (oui-non) ou la quantité dépendront des variables suivantes :

  • l’âge, le sexe et le statut de remboursement du patient (ces variables sont introduites pour tenir compte en partie du case-mix)
  • l’année au cours de laquelle le séjour a eu lieu
  • les hôpitaux sont inclus dans l’analyse en tant qu’effet aléatoire (random effect)
  • les trois caractéristiques de la politique Patient Blood Management (PBM) des hôpitaux : politique, anémie et tranex.

Dans un premier temps, les effets de la politique (policy), de l’anémie (bloedarmoede) et de l’acide tranexamique (tranex) ont été estimés pour explorer les différences entre les hôpitaux (après contrôle des caractéristiques des patients). Les résultats sont présentés dans la Figure 20.8.

Figure 20.8: Blood consumption

La probabilité de consommation de sang (axe horizontal) varie de moins de 1 % (proportion 0.01) dans les hôpitaux ayant la probabilité de consommation la plus faible à plus de 21 % (proportion 0.21) dans les hôpitaux ayant la probabilité de consommation la plus élevée.

S’il y a consommation de sang, le nombre d’unités fluctue entre environ 1,6 et plus de 2,5. Sur base des données de cette figure, on peut affirmer que:

  • les hôpitaux flamands ont statistiquement moins de probabilité d’utiliser du sang (p< 0.01).
  • les hôpitaux avec le plus grand nombre de séjours sont situés plutôt à gauche de la figure, ce qui signifie que la probabilité d’administrer du sang est significativement moindre (cet effet est également statistiquement significatif).
  • il n’y a pas d’effet de la taille de l’hôpital (en nombre de séjours) sur la quantité de sang administrée.

Dans l’étape suivante (voir Table 20.2), les différences entre les hôpitaux observées dans la figure 20.8 sont analysées pour les trois axes du patient blood management étudiés (policy, bloedarmoede en tranex).

Table 20.2: Effect of hospital policy on blood consumption
Probabilty / quantity
Contrast
answer probability quantity #patients #HCI contrast Sign prob? Sign quantity?
policy neen 0.0407 1.74 1377 3 neen/ja
policy ja 0.0411 2.05 47539 87 neen/geen
policy geen 0.0555 2.11 4776 8 ja/geen
bloedarmoede ja 0.0550 1.93 34055 61 ja/neen **
bloedarmoede neen 0.0373 1.99 19637 37
tranex ja 0.0359 1.98 38812 63 ja/neen **
tranex neen 0.0569 1.94 14880 35

En ce qui concerne la politique, aucune différence n’est constatée pour la probabilité de consommation de sang. Il convient de noter que la grande majorité des hôpitaux ont répondu “oui” à cette question, ce qui rend difficile, voire impossible, la détection des différences existantes entre hôpitaux.

En ce qui concerne les deux autres dimensions analysées (bloedarmoede : procédure écrite pour le dépistage de l’anémie et tranex: procédure d’administration de l’acide tranexamique), nous trouvons principalement des différences concernant l’administration ou non de sang. La quantité d’unités de sang utilisée n’est pas différente.

S’il existe une procédure écrite pour le dépistage de l’anémie chez le patient avec pose d’une prothèse totale de hanche élective (réponse = ‘oui’), la probabilité d’administrer du sang est plus élevée que si cette procédure n’existe pas. Malgré la correction pour certains facteurs (âge, sexe,…), d’autres facteurs ont probablement un impact significatif sur ce résultat.

Il semble approprié de poursuivre l’exploration de ce résultat. En effet, celui-ci repose essentiellement sur une enquête en ligne.

Les hypothèses possibles sont les suivantes:

  • La reconnaissance en temps et en heure d’une anémie sévère et une transfusion opportune conduisent-elles à une guérison plus rapide, à moins de complications et à une durée de séjour plus courte ?

  • Existe-t-il une relation entre le fait de structurer les soins (définis par des procédures) et la morbidité des patients traités ? Ces analyses dépassent le cadre de cet audit.

Pour rappel, si un dépistage systématique est réalisé, la majorité des hôpitaux (66/98) procèdent à un dépistage systématique préopératoire entre 4 semaines et 48 h avant l’intervention.

Si l’hôpital dispose d’une procédure pour l’utilisation de l’acide tranexamique, la probabilité d’une transfusion sanguine est significativement plus faible (0,0359 contre 0,0569 si la procédure n’existe pas).