21  Discussion

21.1 Implants

21.1.1 Carte d’implant, UDI et Registre central de traçabilité

Selon notre enquête en ligne, deux tiers des hôpitaux ne remettent pas de carte d’implant au patient, or cette exigence est d’application depuis mai 2021 (règlement européen 2017/745). Une des raisons avancée par les hôpitaux est que les firmes ne délivrent pas de carte d’implant.

Cette situation s’explique par le fait que nous sommes actuellement dans une phase de transition. Les hôpitaux se fournissent en dispositifs médicaux sous la directive (93/42/CE) et/ou sous le règlement (2017/745). En effet, les implants sous la directive ne doivent pas être accompagnés de la carte implant. La carte d’implant et l’UDI ne sont applicables que pour les dispositifs médicaux sous le règlement.

La phase de transition pour les implantables va perdurer jusqu’au 31/12/2027.

Pendant cette période, les fabricants peuvent continuer à produire ET mettre sur le marché des dispositifs sous la directive.

Les dispositifs médicaux sous la directive peuvent être commercialisés jusqu’en 2027, mais il n’y a pas de période de liquidation, de sorte qu’après cette date, ils peuvent simplement rester sur le marché. Pour la plupart des dispositifs stériles, cette période sera de 5 ans (jusqu’à leur date de péremption).

La situation est complexe du point de vue des hôpitaux car la distinction entre les dispositifs médicaux sous la directive ou sous règlement est compliquée, d’autant que ceux sous la directive peuvent (mais ne doivent pas) également disposer d’un UDI.

L’information vers le patient est primordiale. Via les audits de terrain, le constat est que la plupart des hôpitaux n’ont mis aucune action en place pour pallier l’absence de carte d’implant.

Or, des solutions dans la période de transition du règlement existent.

En effet, depuis le 1er mai 2021, la notification de pose ou de retrait d’implants est obligatoire pour, entre autres, les implants prothèses de hanche dans le RCT.

Après chaque introduction de données, une carte implant RCT actualisée peut être générée. Il s’agira d’un document PDF reprenant toutes les données relatives à l’implant (date implantation/explantation, délivrance ...) et au professionnel de la santé concerné. Les données de la carte d’implant RCT et la carte d’implant fournie par les firmes diffèrent quelque peu par leur contenu. Un tableau récapitulatif est disponible ci-dessous Figure 21.1

Figure 21.1: Table summary of the data available on the 2 implant cards

Les patients peuvent consulter le RCT(soit via le site directement, soit via masanté.be) à l’aide de leur carte d’identité, et imprimer une version actualisée de leur carte implant RCT. Le médecin généraliste ou spécialiste peut également délivrer cette carte implant RCT au patient.

La communication avec les patients est primordiale pour assurer une meilleure protection de leur santé. C’est pourquoi nous recommandons que tous les professionnels de la santé informent au maximum leurs patients concernant le système de traçabilité des implants, soit via la carte d’implant physique si elle est délivrée par la firme, soit via la carte d’implant RCT. Pour éditer cette dernière, il faudra que tous les hôpitaux répondent à leur obligation d’encodage dans le RCT via le développement d’un connecteur informatique spécifique à l’hôpital afin d’automatiser le flux des données. Pour rappel, l’enquête en ligne nous indique que seuls 59 % des hôpitaux interrogés répondent à cette obligation.

A terme, dès la période de transition pour les firmes terminée, la carte d’implant physique pourra être remise lors de l’hospitalisation, avec en parallèle l’information vers le patient des données disponibles dans le RCT.

21.1.2 Notification d’incident à l’AFMPS

Des procédures internes existent au sein des hôpitaux pour notifier les incidents en lien avec un implant de prothèse de hanche mais sur base de l’enquête en ligne et des visites sur place, nous recommandons une amélioration de l’information vers le personnel de santé (en particuliers les orthopédistes) en contact avec les implants sur:

  • L’obligation de déclarer;
  • Les critères des incidents entraînant l’obligation de déclarer;
  • La procédure de déclaration à l’AFMPS.

D’autre part, l’une des missions du point de contact de matériovigilance, tel que prévu dans l’AR du 15 novembre 2017, est de sensibiliser l’ensemble des utilisateurs au sein de l’établissement de santé.

21.1.3 Comité du matériel médical

Les missions du comité du matériel médical ne semblent pas atteintes pour une large partie des hôpitaux ayant répondu à l’enquête en ligne. En effet, seul un peu plus d’un tiers de ceux-ci éditent un rapport annuel. De plus, si le rapport est édité, la plupart des items qui devraient être présents (voir l’article 27 de l’AR du 4 mars 1991) ne sont pas repris.

21.2 Antibioprophylaxie

Le programme Pay for Performance (P4P) a étudié l’indicateur antibioprophylaxie dans le contexte des prothèses de hanche en 2018 (indicateur = le choix et la dose de l’antibiotique répondant aux directives de la BAPCOC). Les données couplées utilisées s’étalaient de 2012 à 2014. Le moment de l’administration n’était pas analysé.

Lors de la publication du rapport en 2018, la conformité était de 90 % avec une marge d’amélioration dans certains hôpitaux. A ce jour, cette mesure n’a pas été répétée.

Les résultats obtenus via le questionnaire en ligne et les données de facturation 2019 pour les séjours sélectionnés dans le cadre de l’audit des prothèses de hanche confirment cette adéquation aux recommandations publiées par la BAPCOC en 2017 tant pour le choix de l’antibiotique, que pour le moment de l’administration (dans les 60 minutes avant l’incision).

21.3 Thromboprophylaxie

Une intervention pour prothèse de hanche est une opération avec un risque de thrombose veineuse profonde élevé mais également avec un risque de saignement élevé, il faut donc prendre en compte les deux aspects.

Le webinaire disponible sur le site de BeQuinT propose les recommandations issues de la BSTH en matière de thromboprophylaxie qui sont de débuter le traitement par HBPM en post-opératoire pour une durée de 10 jours minimum jusqu’à 35 jours. Les résultats obtenus via l’enquête en ligne sont conformes à ces propositions.

Dans le rapport de la première enquête sur le PBM, BeQuinT recommande également d’éditer des consignes claires pour l’arrêt et la réintroduction des anticoagulants (AVK , NOACs) et/ou des médicaments antiplaquettaires en pré et postopératoire. Ces éléments seront à intégrer dans une procédure : moment de l’arrêt de ces médicaments avant la chirurgie élective, définition des critères pour faire le pont entre l’anticoagulant utilisé en peropératoire et celui utilisé par le patient en pré et post-opératoire et moment ainsi que la méthode de réintroduction du traitement après la chirurgie.

Pour la chirurgie élective, les hôpitaux interrogés utilisent dans leur grande majorité une procédure écrite. Sur base de nos observations, ce n’est pas le cas dans le cadre d’une fracture. Nous constatons qu’un quart des hôpitaux visités n’en disposent pas.

Le traitement anticoagulant étant un des facteurs d’allongement du délai entre l’admission du patient et son intervention pour fracture, nous recommandons que tous les hôpitaux disposent d’une procédure écrite pour la gestion du traitement anticoagulant (arrêt et reprise) dans un contexte électif, mais également d’urgence. En effet, l’allongement du délai pour la prise en charge lors d’une fracture a un impact sur la morbidité et la mortalité. Plusieurs recommandations internationales sont disponibles (AAOS 2021 ; NICE 2011).

21.4 Patient Blood Management

D’après les réponses au questionnaire en ligne, on peut observer que certains hôpitaux belges mettent déjà en application les concepts du PBM mais une amélioration est encore à envisager pour les points suivants:

  • Elaboration d’une procédure de dépistage de l’anémie préopératoire (38 % des hôpitaux n’en disposent pas pour la chirurgie de remplacement de hanche). Dans le cadre d’un rapport du KCE (KCE Reports 280Bs) sur les examens préopératoires de routine), la chirurgie de remplacement de hanche est définie comme une chirurgie majeure ou complexe. Dans ce contexte, une formule sanguine complète est recommandée.
  • Elaboration d’une procédure de traitement de l’anémie préopératoire (16 hôpitaux déclarent ne jamais dépister une anémie préopératoire et seuls 46 hôpitaux déclarent disposer d’une procédure écrite)
  • Harmonisation du seuil de prise en charge de l’exploration de l’anémie (le seuil est variable entre hôpitaux)
  • Harmonisation du seuil de transfusion (le seuil est variable entre hôpitaux )
  • Recours à l’acide tranexamique dans la PTH (NICE 2020). En effet, seuls 54 hôpitaux sur les 98 interrogés (55 %) l’utilisent de manière systématique et la facturation de cette molécule n’est retrouvée que dans 80 % des séjours de PTH
  • Utilisation d’une procédure pour l’utilisation de l’acide tranexamique (PTH programmée). En effet, nous avons démontré que la probabilité d’une transfusion sanguine est significativement plus faible si l’hôpital dispose d’une procédure
  • Recours à l’acide tranexamique dans le cadre de la fracture, notamment chez les patients les plus âgés ( AAOS 2021). En effet, nous constatons que la facturation de cette molécule n’est retrouvée que dans 65 % des séjours du cluster 3 (PTH pour fracture) et 44 % des séjours du cluster 5 (prothèse fémorale pour fracture)
  • Elaboration d’une politique transfusionnelle hospitalière et information du personnel soignant quant à son existence (9 hôpitaux sur les 98 interrogés déclarent ne pas disposer d’une politique transfusionnelle institutionnelle)